Zoom sur notre communauté : Une page qui se tourne, pour notre cofondateur Yoann Bagot

Communauté 07-10-2019

 



C’est le résultat de beaucoup de sacrifices et le plaisir que cela procure est bref et immédiat. La plupart du temps, on passe rapidement à autre chose et on n’en profite pas.



 


Bonjour Yoann, vous participerez mardi à votre dernière course professionnelle.


Oui, c’est exact. Tout ce qui a un début a une fin, et la fin c’est demain !


 


Vous venez d’avoir 32 ans. Ce n’est pourtant pas si vieux….


Tout est relatif…


 


Certes, mais n’espériez-vous pas poursuivre l’aventure encore quelques années ?


Avant de répondre à cette question, vous auriez pu me demander les raisons de cet arrêt, non ?


 


Désolé, je débute dans le métier… Pouvez-vous donc nous donner les raisons de cette fin de carrière?


La première raison, c’est parce que mon contrat n’a pas été reconduit !


Mais je me serais viré moi même si on ne l’avait pas fait pour moi, car je n’avais simplement plus le niveau pour être coureur. Cela fait un moment que je trainais ma misère sur les courses.


Je n’ai jamais été aussi sérieux qu’en ce début de saison, j’ai fait mon plus gros hiver et dès la première course, je suis tombé malade !


Je retombais malade tous les mois et j’avais l’impression d’être vidé, sans force, tout le temps cramé.


J’ai une jambe plus longue que l’autre et, couplé à d’autres soucis, cela me provoque des douleurs récurrentes lorsque je suis sur le vélo. Ces derniers mois ressemblaient à un vrai chemin de croix ! Quand tu as déjà eu un certain niveau et que tu sais que tu en es très loin,  c’est un vrai calvaire.


En clair, c’est un immense soulagement de raccrocher !


 


Comment cela s’est-il passé avec l’équipe VITAL CONCEPT – B&B HOTELS ?


Franchement, très bien !


Tout le monde a compris que je faisais de mon mieux mais que je n’y arrivais pas ! Le corps ne suivait plus. Le staff ne m’a pas lâché dans la nature malgré mes mauvaises prestations sur le vélo.


Humainement, j’ai apprécié ces deux dernières années et je suis déçu de ne pas avoir pu apporter plus sur le vélo, mais je peux me regarder dans une glace et me dire que j’ai fait le maximum.


Jérôme Pineau a construit une belle équipe un beau projet, j’aime sa façon de penser et de manager.


Sa vision du club est moderne et en adéquation avec un monde qui évolue et qui se transforme.


J’espère que le projet va continuer de grandir, c’est tout ce qu’il mérite.


Nos échanges avec Jérôme ont toujours étaient clairs, je devais tout donner pour retrouver le niveau et si ce n’étais pas le cas, j’arrêtais.


 


Comment avez-vous vécu cette dernière saison ?


Déjà, tu peux me tutoyer. Je ne suis pas encore si vieux !


Humainement, nous avions un super groupe, j’ai pris énormément de plaisir en dehors du vélo avec Arthur, même si il m’a vite abandonné (rire) et je suis aussi content d’avoir rencontré Pierre Rolland ou Cyril Gautier, avec qui on a bien rigolé !


Sur le vélo, ce fut néanmoins beaucoup moins drôle.


Ma femme a eu beaucoup de mérite de me supporter cette année. Je suis devenu Papa en mai et cela m’a permis de relativiser. Lorsque j’ai compris que j’allais arrêter, j’étais beaucoup plus tranquille avec moi-même !


 


Peux-tu ressortir un moment précis de cette année ?


La naissance de ma fille, évidemment. Sur le vélo, le Dauphiné m’a marqué. J’ai vraiment galéré les quatre premiers jours puis, le cinquième, je me suis levé en me sentant beaucoup mieux, sans n’avoir aucune explication rationnelle à cela. Je me suis dit « aujourd’hui, je mets tout » !


Nous sommes sortis à trois, avec De Marchi et Stéphane Rosseto, avec qui j’ai partagé pas mal de bons moments chez Cofidis, puis nous nous sommes fait revoir à 1 km de l’arrivée après 200 km d’échappée. Deux jours plus tard, retour à la réalité : j’étais malade et j’ai dû abandonner.


 


Que retiens-tu de tes années professionnelles ?


Franchement, pas grand-chose.


 


Sérieusement ?


Non ! Ces neuf dernières années m’ont beaucoup apporté sur le plan personnel. Ce n’est pas une victoire, un résultat ou un moment que je retiens en particulier. Mais lorsque je compare l’homme que j’étais à mes débuts et celui d’aujourd’hui, je mesure le chemin parcouru.


Le vélo est un sport difficile et il permet d’apprendre à se connaître et à évoluer. Savoir aussi se confronter à la concurrence, se fondre ou se démarquer dans un collectif, gérer les mauvaises périodes, le stress des voyages… Grandir, quoi ! Ce qui me restera néanmoins, c’est la capacité à se battre et les sacrifices qu’il faut consentit pour atteindre ses objectifs.


 


Quels est le moment qui t’as le plus marqué ?


En 2012, après un bon début de saison, j’étais pressenti pour participer au Tour. J’étais échappé sur le Championnat de France et le manager Éric Boyer s’est fait licencier au profit d’Yvon Sanquer, sans que l’on ne sache rien. Le lundi, j’attendais le coup de fil d’Eric pour m’annoncer ma sélection au Tour et, là, Didier Rous m’appelle et me dit que le manager a changé, que je ne vais pas au Tour et que l’équipe me vire sans explications !


Paradoxalement, c’est une immense chance d’avoir vécu ce genre de situation. Cela m’a permis de m’endurcir et me blinder pour le reste de ma vie. Plus rien ne me fait peur, ou presque. 


Grâce au vélo, j’ai pris beaucoup de maturité et mon caractère s’est affirmé.


 


Bon, tu as un peu cassé l’ambiance, là ! Quel est ton meilleur souvenir ?


Franchement, je ne sais pas. C’est bizarre mais, par exemple, ma victoire au Tour du Gévaudan ne m’a pas vraiment apporté d’émotions.


Au final, si on y réfléchit, en quoi passer une ligne d’arrivée devant d’autres gars peut te rendre heureux ?


Et si tu le fais une fois, pourquoi cela te rendrait plus heureux de le faire une deuxième fois ?


C’est le résultat de beaucoup de sacrifices et le plaisir que cela procure est bref et immédiat. La plupart du temps, on passe rapidement à autre chose et on n’en profite pas.


Il faut réussir à comprendre quel est ton moteur, ce qui te pousse à te dépasser. Et par la même occasion, ce qui te procure un bonheur durable.


C’est dur de faire ressortir un souvenir plutôt qu’un autre mais je retiens surtout les aventures humaines que j’ai pu vivre, sur les Grands Tours notamment.


 


Une anecdote ?


Sur l’une de mes premières courses, le Tour Med, je faisais chambre avec David Moncoutié et, à 30 km du Mont Faron, il s’arrête faire un besoin naturel, je l’attends et il me dit j’en ai gardé pour le contrôle ! 45 minutes plus tard, il gagnait. La classe, quoi !


 



J’ai rêvé grâce au vélo durant mes premières années et, sur la fin, j’ai perdu cette flamme car mon physique n’était plus en adéquation avec mon mental. Avec Bike'N Connect, j’ai retrouvé un challenge pour me lever le matin.



 


J’imagine qu’en 9 ans, tu dois avoir plein d’amis dans le peloton ?


Pas vraiment. Au final, mis à part Arthur Vichot, je n’ai aucun coureur en activité dans mon cercle très proche.


J’ai rencontré beaucoup de bonnes personnes et j’aurais grand plaisir à revoir tout le monde mais le milieu professionnel n’est pas le meilleur endroit pour se faire des amis.


Je suis préparé à ce que tout le monde m’oublie l’an prochain quand j’aurai arrêté !


 


Quels est votre plus grand regret ?


Mon abandon sur le Tour en 2013. J’avais fait trois semaines de stage en montagne, je marchais super fort et j’ai eu une intoxication alimentaire… Ensuite on ne m’a plus jamais redonné ma chance.


 


Avez-vous de l’amertume par rapport à cela ?


Non, pas du tout, bien au contraire ! Au début, j’idéalisais le Tour, les victoires et le reste pour tout ce que cela représente mais, au final, cela reste du vélo.


Ma philosophie de vie à énormément évolué. Grâce à cela, je me suis posé les bonnes questions en essayant de trouver ce qui me rendait vraiment heureux et comment me rapprocher du bonheur. Au final, je cherche, je tâtonne toujours, je n’ai pas la recette exacte, sinon cela se saurait et je serai milliardaire!


 


Qu’est ce qui t’a le plus énervé dans le milieu durant ta carrière ?


Le fait que si tu ne marches pas, tu deviens une mauvaise personne. On pense de suite que tu ne fais pas bien ton métier, tu as tous les défauts et tu as forcément tort. Tu n’es pas écouté.


En revanche, si tu marches tout le monde te met sur un piédestal. Tu deviens quelqu’un d’important aux yeux de tous.


C’est une situation qui m’a toujours fait sourire. Si un leader dit blanc, tout le monde aura tendance à aller dans son sens même s’il a tort. C’est pour cela que j’ai toujours différencié l’homme du coureur.


 


Ton père a fait une carrière professionnelle. Cela aura-t-il été une force ou une faiblesse ?


C’est une question difficile. Je n’ai jamais cherché à me comparer à lui. Nous avons eu deux carrières très différentes, à des époques différentes. Chacun a vécu une expérience différente. Il est plus passionné que moi et, quand j’ai su que j’allais arrêter, j’étais presque déçu pour lui même s’il ne m’a jamais poussé à faire du vélo.


 


Vas-tu continuer le vélo ?


Oui, bien sûr. Faire du sport, du vélo, avoir une hygiène de vie correcte, ce sont des valeurs auxquelles je crois même si je ferai quelques excès car on n’a qu’une vie !


Partager des bons moments avec les copains sur le vélo, c’est l’essence même de ce qui m’a poussé à créer Bike'N Connect.


 


As-tu des passions en dehors du vélo ?


Ma femme (je sais qu’elle va lire et je veux marquer des points). Sérieusement, j’ai toujours été passionné et hyper curieux par des thèmes et activés très variés comme le cinéma, les voyages, la pêche, la géographie, l’histoire, le sport, le business, etc…


Ma philosophie est très simple : plus je connais le monde dans le lequel j’évolue, plus je serai capable de vivre la vie que je veux.


Je suis aussi féru d’astrophysique et plus j’étudie le sujet, plus je me dis que nous ne sommes que des petites poussières qui vivons un temps infime et que cela ne vaut pas le coup de se prendre la tête pour rien. Encore une fois, on n’a qu’une vie !


Néanmoins, le quotidien peut vite nous rattraper, et quand c’est le cas je garde tout cela à l’esprit.


 


Justement, revenons à un sujet plus terre à terre. Que vas-tu faire après ta carrière ?


Je vais vivre de mes rentes ! Non, malheureusement je n’ai pas été assez bon pour cela et c’est d’ailleurs une très bonne chose car j’ai toujours autant envie de me battre, mais plus pour le vélo !


Je vais me lancer à fond dans Bike'N Connect. Le concept évolue et nous allons enfin sortir la nouvelle version dès cet hiver.


J’ai rêvé grâce au vélo durant mes premières années et, sur la fin, j’ai perdu cette flamme car mon physique n’était plus en adéquation avec mon mental. Avec Bike'N Connect, j’ai retrouvé un challenge pour me lever le matin.


 


Peux-tu nous en dire plus ?


Nous ouvrons l’App à tous les sports. Un sportif pourra :


- Trouver d’autres sportifs et se connecter à eux


- Gérer son groupe de copains ou son club et organiser ses entraînements grâce à l’ajout d’un chat


- Retrouver et s’inscrire en quelques clics aux événements sportifs


- Retrouver des magasins spécialisés dans sa pratique du sport (magasin de vélo, café vélo, locations de vélo, etc...)


Notre ambition est de devenir le plus grand club du monde !


 


Quels est ton plan d’action ?


Ma priorité est de faire connaitre notre offre pour les organisateurs d’événements sportifs.


Notre plateforme leur permet de gérer gratuitement leurs événements de A à Z, avec un espace organisateur à la pointe de la technologie.


Les utilisateurs pourront s’inscrire directement avec l’application et s’entrainer ou covoiturer pour aller à l’événement.


De plus, leur événement sera mis en valeur auprès de toute notre base d’utilisateurs, grâce à la géolocalisation !


Donc si vous organisez un événement sportif, quel qu’il soit, contactez-moi !!!


Nous allons aussi présenter notre offre pour les magasins de vélos et de sport afin de leur apporter de la visibilité et un lien avec leurs clients


 


Tu risques de ne pas t’ennuyer !


Ce serait bon signe… De plus, je vais reprendre les études en parallèle. Je ferai aussi du consulting à qui acceptera que je le consulte ! C’est pourquoi je ne suis fermé à aucune proposition !


 


As-tu des personnes à remercier ?


Ma famille et mes amis, en premier lieu. Pour me supporter au quotidien mais aussi pour tout ce qu’ils ont pu m’apporter et ce qu’ils continueront de faire.


Ma femme a traversé toute ma carrière avec les bons et les mauvais moments, mais je pense que tout cela nous aura fait prendre beaucoup de maturité.


Je remercie aussi les différentes équipes dans lesquelles j’ai évolué. Le VC LA POMME, COFIDIS ET VITAL CONCEPT – B&B HOTELS de m’avoir permis de vivre de ma passion durant toutes ces années.


Je remercie les gens qui m’ont supporté et à qui j’ai pu très modestement procurer un peu de bonheur.